Films, Musiques & Livres

Les poings contre les murs

Drame social et familial (Royaume-Uni, 2014, 106 min)

prix du jury de Beaune 2014

Réalisateur : David Mackenzie

Scénario : Jonathan Asser

Direction artistique : Tom McCullagh

Costumes : Susan Scott

Montage : Nick Emerson et Jake Roberts

Musique : Tony Doogan et David Mackenzie

Photographie : Michael McDonough

Son : Joakim Sundström

Production : Gillian Berrie

Sociétés de production : Sigma films, Film4, Lipsync Productions, Quickfire Films

Sociétés de distribution : Wild Side Films, Le Pacte (France)

Avec... Jack O'Connell, Rupert Friend, Ben Mendelsohn, , Peter Ferdinando, Sam Spruell, David Ajala, Sian Breckin, David Avery, Matt Faris, Anthony Welsh, Shane McCaffrey, Ryan McKenna

 

Synopsis :  

Délinquant instable et violent, Eric Love, 19 ans, est transféré dans un centre pénitentiaire pour adultes. Jeté prématurément dans cet univers carcéral sinistre et dangereux, le jeune homme engage alors une lutte éprouvante pour s'affirmer face aux autres détenus et aux surveillants et tenter de se faire respecter. Grâce à sa rencontre et à ses échanges avec Oliver, le psychiatre de la prison, Eric apprend peu à peu à contrôler ses pulsions. Tandis qu'il découvre les nouvelles règles de survie et se bat pour ne pas être détruit, il rencontre Neville, son père, qui a passé une grande partie de sa vie derrière les barreaux…

 

Dans la presse et au fil des blogs...

| Genre : violence et espoir.

Quand le jeune Eric passe les portes d'une prison anglaise, on est sûr de ce qui l'attend : violence, trafic de drogue et guérilla carcérale. Les ingrédients classiques du film de prison, le réalisateur David Mackenzie s'en empare avec une énergie brutale, toute de tension et de rage, qu'il semble emprunter aux détenus mêmes.

Si les images bousculent par leur dureté, elles transmettent surtout un désir de partage. Peu à peu, le personnage d'Eric s'apprivoise. Les éruptions de fureur laissent place à des moments de fragile apaisement. Une possibilité semble apparaître, pour ce garçon enfermé dans sa cellule et à l'intérieur de lui-même, de se libérer des chaînes de la violence. C'est au scénariste, Jonathan Asser, qu'on doit ce message d'espoir. Il évoque ici sa propre expérience de thérapeute en prison. Son rêve de faire surgir une parole là où le seul langage possible est celui des coups. Dans la prison, Eric va retrouver son père, incarcéré lui aussi. Aucun lien ne les a jamais unis, et c'est dans cet univers hostile, où il ne reste presque rien des rapports humains, qu'ils vont apprendre à se connaître. Cette idée, presque trop belle, David Mackenzie sait la rendre vivante, captivante et, à l'image de son film, à la fois percutante et sensible. — Frédéric Strauss (Télérama)


 Depuis 2002, le cinéaste britannique David MacKenzie alterne drames (Young AdamMy Name is Hallam FoePerfect Sense) et comédies à tendance romantique (Toy BoyRock’n’love) avec plus ou moins de succès. Avec Les Poings Contre les Murs, son nouveau film, il revient au drame, à la fois familial et social, dans l’univers carcéral balisé. Pour apporter un nouveau souffle au film de prison, genre très codifié pouvant très vite se laisser aller à la vulgaire photocopie des classiques (La Grande EvasionMidnight ExpressL’évadé D’AlcatrazLes évadésUn Prophète pour citer quelques uns des plus marquants), on est en droit d’attendre une vision différente et des personnages au développement plus inattendu. On se lasserait rapidement de banals rapports de forces entre détenus au sein de l’enceinte sécurisée si l’on ne trouvait pas un peu plus de matière autour. En ce sens MacKenzie remplit parfaitement son contrat en parvenant à traiter le sujet avec originalité. Son petit plus ? Aborder les relations (épineuses) entre un père et son fils détenus dans les mêmes geôles.

Eric (Jack O’connell), jeune délinquant de 19 ans, au caractère bien trempé et au très fort degrés de violence retrouve son paternel Nev (Ben Mendelsohn) condamné à purger une peine de prison à perpétuité. Père et fils se connaissent à peine puisque Nev est en cabane depuis le plus jeune âge de sa progéniture. Eric, sans point de repère, a fini par mal tourner, au point de s’être fait incarcérer pour meurtre. L’arrivée de ce "surclassé" dans ce monde d’adultes connu pour sa dureté (un traitement réservé aux jeunes individus les plus violents) va commencer comme un exutoire et un moyen de ne pas passer pour un faible en usant des provocations (le passage à tabac d’un voisin de cellule suivi par une confrontation musclée et "bien huilée" avec les gardiens).
Comme pour beaucoup de films carcéraux des années 2000 (FelonUn Prophète et le récent R), MacKenzie choisit une approche tournée vers le réalisme du milieu où la violence est omniprésente. Faire ses preuves par la force et trouver une bande est ici primordial pour ne pas finir dérouillé en permanence, jouer les larbins ou encore servir d’objet sexuel. Avec un père connaissant les moindres recoins du pénitencier qui s’est acoquiné au grand caïd des lieux, cela paraît forcement plus simple de s’acclimater, mais voilà, Eric ne cherche pas un traitement de faveur, il veut se faire tout seul, c’est aussi pour lui une façon de s’opposer à son père, coupable de l’avoir délaissé. 

Le relationnel père/fils est particulièrement bien traité et il s’agit surement de la plus grande réussite du film. Une dualité s’en dégage mais au fond les liens du sang et l’amour paternel reprennent le dessus, ce qui donne lieu à des séquences parfois touchantes, comme lorsque Eric et Nev se retrouvent placés en quartier d’isolement, ou bien lors de la dernière scène du transfert. Le film n’échappe cependant pas à certains clichés (mais lorsqu’on choisit de jouer la carte du réalisme, peut on vraiment y échapper ?) : directeur ordurier, règlement de comptes et jalousies entre détenus, matons qui ferment les yeux sur certaines pratiques, agressions dans les douches, gros caïd toujours actif en détention. Il a en revanche la bonne idée de s’étaler sur un terrain à caractère social, celui de la réinsertion après peine. Eric est invité à rejoindre le groupe de parole de gestion de la violence d’un psychologue (Rupert Friend) afin de l’aider à se canaliser. Le psy va jouer un rôle de médiateur pour le jeune homme, l’aider à exprimer ce qu’il cache au fond de lui et le libérer de ses excès de colère. Le travail n’a rien de facile comme on pourra le constater mais s’avère néanmoins précieux, donnant même lieu à des dialogues parfois cocasses entre les participants. Enfin nous n’oublierons pas de saluer la prestation d’un David O’connell au jeu très inspiré, complètement habité par son rôle, c’est une véritable révélation, livrant ici sa prestation la plus intense à ce jour.
Abreuvé d’amour et de haine, le film de David MacKenzie laisse éclater ses instincts bestiaux pour mieux s’adoucir. Cette recherche de rédemption paternelle en milieu carcéral en impose.

Pierre Vedral, avoir-alire.com

 

Film-choc sur l'enfance brutale, maltraitée, qui conduit un jeune homme solitaire à devenir une boule de violence et de colère. Un homme organise bénévolement des 'temps de parole' ouverts aux détenus afin que ceux-ci retrouvent l'humanité qu'ils avaient voulu taire pour assurer leur survie en milieu hostile. Peu à peu ils parviennent à dompter leur colère, à la contenir pour enfin pouvoir s'ouvrir aux autres dans une très prudente confiance. Long travail qui obtient de vrais résultats malgré un personnel carcéral peu coopératif. 

Vu en juin 2018 (Netflix) (Marianne)