Films, Musiques & Livres

Only lovers left alive
Only lovers left alive

Drame, romance (Grande-Bretagne, 2014, 123 min)

Réalisateur : Jim Jarmusch

Scénario : Jim Jarmusch

Directeur de la photographie : Yorick Le Saux

Montage : Affonso Gonçalves

Musique : Jozef van Wissem et Jozef van Wissem 

Producteur: Zakaria Alaoui, Jeremy Thomas et Reinhard Brundig

Production : Recorded picture compagny, Pandora fim, Snow wolf

Tom Hiddleston (V. F. : Loïc Corbery) : Adam, Tilda Swinton (V. F. : Catherine Wilkening) : Eve, Mia Wasikowska (V. F. : Juliette Allain) : Ava, John Hurt (V. F. : Georges Claisse) : Marlowe, Anton Yelchin (V. F. : Matthieu Sampeur) : Ian, Jeffrey Wright (V. F. : Alex Descas) : Dr Watson, Slimane Dazi : Bilal, Maxence Herrmann : Vince, Wayne Brinston : Mirror Man, Yasmine Hamdan : Elle-même

 

Synopsis :  

Adam et Eve forment un couple de vampires cultivés et fragiles. Leur idylle dure depuis plusieurs siècles. Dans le port marocain de Tanger, Eve compte sur Christopher Marlowe, le concurrent malheureux de Shakespeare, pour l'approvisionner en poches de sang sain. De loin, elle reste en contact avec son compagnon Adam, qui vit à Detroit. Punk aristo lassé par la médiocrité des humains, Adam a des idées suicidaires. Animée d'un obscur pressentiment, Eve prend l'avion pour Detroit. Mais les retrouvailles du couple sont perturbées par l'arrivée d'Ava, la jeune soeur d'Eve, une éternelle adolescente, incontrôlable, qui préfère encore s'abreuver à la source...

 

Dans la presse et au fil des blogs...

Après avoir vécu plusieurs siècles et influencé les carrières de nombreux musiciens et scientifiques connus, Adam est devenu un musicien reclus. Il passe ses journées à enregistrer des albums avec un équipement démodé et à se lamenter sur l'état du monde actuel tout en boudant dans une maison délabrée dans un quartier déserté de Detroit. Il est devenu convaincu que l'humanité est condamnée et se réfère sans cesse aux hommes comme des « zombies ».

Adam survit grâce à des dons de la banque du sang revendus illégalement par le Docteur Watson, qui est heureux de prendre l'argent d'Adam sans poser de question. Ayant acquis de nombreuses connaissances scientifiques au fil des années, le vampire a réussi à construire un engin pour alimenter à la fois son domicile et sa voiture de sport avec la technologie inventée par Nikola Tesla. Malgré sa nature solitaire, il est immensément riche et reste un musicien populaire. Ses nombreux fans spéculent sans cesse sur son sort et sa vraie identité. Adam est horrifié quand quelques-uns d'entre eux sonnent à sa porte un soir après avoir trouvé son adresse. Il les ignore et ils disparaissent.

Le vampire paye aussi Ian, un humain naïf, pour qu'il lui apporte diverses guitares vintages et du matériel d'enregistrement. Un soir, Adam lui demande de lui trouver une balle en bois pour, comme il le dit, un « projet d'art secret ». Ian répond à sa demande et Adam charge la balle dans un petit pistolet. Il envisage de se suicider mais un appel de sa femme, Eve, le convainc de ne pas aller au bout de ses plans.

Eve a passé ces dernières années à vivre à Tanger où elle achète son approvisionnement en sang à un autre vampire, Christopher Marlowe. Craignant pour la vie d'Adam, elle s'envole pour Detroit. Les amoureux sont réunis et heureux, appréciant la compagnie de l'autre, buvant des verres de sang, jouant aux échecs, dansant sur de la musique, et conduisant dans la ville la nuit. Peu de temps après, la sœur d'Eve, Ava, arrive de Los Angeles et brise l'isolement idyllique du couple. Après être sorti un soir, dans un club local, Ava tue Ian, le vidant de son sang et se fait chasser de la maison d'Adam.

Adam et Eve se débarrassent du corps de Ian dans une usine abandonnée. L'attitude impulsive d'Ava, ainsi qu'un nombre grandissant de fans d'Adam venant sonner chez lui, oblige le couple à revenir en hâte à Tanger. Étant en manque de sang, ils découvrent que leur ami de longue date et mentor Marlowe est tombé malade en raison d'un lot de sang contaminé. Après avoir révélé qu'il a secrètement écrit la plupart des pièces de Shakespeare, il meurt. A court d'argent et en manque de sang, le couple repère un autre couple de jeunes adolescents qui s'embrassent. « Est-ce que nous avons le choix ? » fait remarquer Adam avant qu'ils ne s'approchent du couple avec leurs crocs dehors.

wikipedia (synopsis développé)


 

Avec le mythe du vampire, Jim Jarmusch peut projeter sa solitude noctambule et dandy, mais aussi gagner en suspense : ses héros sont assoiffés de sang, ­selon les codes du genre. Elle, c’est Tilda Swinton, plus égérie que jamais. Lui (Tom Hiddleston) vit reclus au ­milieu de ses guitares de collection. Ils sont tellement civilisés qu’ils se fournissent en hémoglobine dans les stocks hospitaliers, autant que possible…

Jarmusch répond donc à Twilight (la saga blockbuster) ou à True Blood (la série télé) en redonnant aux vampires un cachet littéraire. Ses personnages ont croisé Shakespeare, Schubert, Einstein… Comment vivre quand on a déjà eu plusieurs vies ? Telle est l’interrogation qui hante leurs voyages immobiles ou transatlantiques — Jarmusch, ex-prince de l’avant-garde new-yorkaise, se posait déjà la question dans Broken Flowers. Mais les balades des deux héros dans Tanger et Detroit, ville fantôme, célèbrent aussi la transformation inéluctable des choses. Et disent la beauté des ruines, viviers de nouveauté en sommeil.

L’autre antidote au désenchantement, c’est l’idéal du couple. Regarder passer les époques à deux, depuis le balcon de leur bizarrerie, voilà le hobby préféré des « seuls amants restés en vie », comme dit le titre. Mais attention, le grand amour selon Jim, ­vécu en partie à distance, est anticonformiste. Il peut et doit se régénérer par l’accident, la transgression. A cet égard, Jarmusch, qui prend toujours son temps, nous réserve le plus saignant pour la fin.

Louis Guichard, Télérama


Mal accueilli au dernier Festival de Cannes, Only lovers left alive est un échec sur toute la ligne. La première raison de cet échec réside sans aucun doute dans le fait que Jim Jarmusch n'a pas pris la peine d'écrire une histoire pour ses personnages appelés Adam et Eve. Le réalisateur américain s'est contenté de créer un univers plutôt underground. En effet, les personnages ont beau être âgés de plusieurs siècles, le réalisateur ne s'embarrasse pas de leur passé et ne nous livrera jamais le moindre élément sur Adam et Eve. Ainsi, on ne saura jamais pourquoi ils vivent dans deux pays différents alors qu'ils sont éperdument amoureux l'un de l'autre. On ne saura jamais ce qui s'est passé il y a 87 ans à Paris avec Ava, la sœur d'Eve. Sans intrigue, le film est une longue errance qui se transforme rapidement en une longue agonie pour le spectateur.

Les vampires de Jarmusch reprennent la figure classique du vampire. Ainsi, Adam et Eve sont des vampires aristocrates qui se complaisent dans la beauté de l'art et qui méprisent l'espèce humaine qu'ils surnomment « les zombies ». Afin d'accentuer l'attitude bobo de ses vampires, le réalisateur a choisi de les alimenter sans passer par le meurtre. Jarmusch propose donc une vision très pessimiste de l'espèce humaine. L'homme apparaît comme un être inintéressant et en pleine perdition qui évolue dans une société qui court à sa perte. L'homme apparaît également comme une menace pour les vampires mais aussi pour eux-mêmes. Ainsi, Adam est terrifié à l'idée d'être connu et reconnu. Il ne supporte pas que des jeunes, admirateurs de sa musique viennent frapper à sa porte pour le rencontrer. De plus, les rares humains dont il est question se mettent en danger ou mettent les autres en danger. C'est le cas d'Ian qui n'écoute pas les conseils d'Adam et qui sera bu par Ava. C'est également le cas des vendeurs de drogue dans les rues de Tanger ou encore de Kit, qui est en fait Christopher Marlowe qui aurait écrit la plupart des pièces de William Shakespeare. Enfin, le sang des hommes est potentiellement dangereux pour les vampires, comme en témoigne la mort de Kit, intoxiqué par du sang contaminé. Bref, les êtres humains sont peu reluisants. Afin de se préserver, Adam et Eve évitent au maximum le contact avec les hommes et mettent en pratique la doctrine « pour vivre heureux, vivons cachés ».

On comprend aisément que Jarmusch prenne du plaisir à filmer l'errance mais cela ne justifie en rien l'ennui que provoque son film. On sait que Jim Jarmusch aime la musique et en particulier la musique rock et il n'hésite pas à dévoiler sa playlist du moment dès que l'occasion se présente. Utilisée à outrance, on finit par se lasser. Enfin, on ne parvient à comprendre où le réalisateur veut en venir. Le sang fait ici clairement allusion à la drogue. Ainsi, à chaque prise, les personnages sont en pleine extase. Le manque les affaiblit et les pousse à convertir un couple en vampires. Faut-il y voir une réflexion sur la drogue ? Sur notre société moderne ? Un élément de réponse est donné à la fin du film mais ne parvient pas à convaincre. Ainsi, les personnages discutent du manque d'eau qui ne va pas tarder à toucher l'humanité. Faut-il y voir une critique sur notre société de consommation qui détruit tout sur son passage ?

erin, www.odysseeducinema.fr


 

 Entre Detroit et Tanger, l’amour multiséculaire et les errances d’un couple de vampires dandy, comme une réflexion mélancolique sur le déclin de l’humanité... Un Jarmusch envoûtant avec un duo magistral, Tilda Swinton et Tom Hiddleston, en couple éternel qui regarde les hommes tomber...

À Detroit, Adam, vampire et rocker glam désenchanté, sombre dans le désespoir et songe à se suicider. Intuitivement alertée par son état malgré les milliers de kilomètres qui les sépare, Eve, son amour depuis des siècles, longue silhouette se glissant la nuit dans les ruelles de Tanger, prend aussitôt l’avion pour le sauver. Une fois encore, les amants se retrouvent avec la même évidence. Mais Ava, l’épuisante sœur cadette d’Eve, tout aussi vampire, vient les perturber.

Anges noirs vagabonds
Dans ce film de vampires qui néglige, avec une feinte désinvolture, les codes du genre, Jim Jarmusch met en scène une histoire d’amour absolu et d’immortel désir, sur fond – et fin – de monde gangrené par un capitalisme dévoyé. Anges noirs vagabonds, unis par les liens du sang, qu’en héros raffinés ils prennent soin d’acquérir dans des centres hospitaliers, Adam et Eve, esthètes dans l’âme, traversent les siècles avec une sombre élégance. Ils déambulent la nuit dans deux cités fantomatiques : Detroit, l’industrieuse assassinée, et la mystérieuse Tanger, filmées l’une et l’autre avec une grâce inouïe. Lui, nostalgique assumé, est harassé de se survivre, retranché dans sa maison envahie de guitares électriques et de sofas sans âge. Elle, avec une classe impériale, s’emploie à le sauver en douceur : au fil des siècles, on apprend à se connaître... En couple éternel qui regarde les hommes tomber, Tilda Swinton et Tom Hiddleston composent un duo magistral. Pourquoi continuer à vivre ? Pour aimer, souffle encore le romantique Jarmusch, qui signe une réflexion mélancolique sur le déclin de l’humanité d’une inoubliable beauté.

Arte

 Film d'atmosphère : la photo et la bande-son sont très soignées. On se laisse porter par l'étrangeté du thème, si l'on veut bien faire abstraction de tout réalisme, en particulier les scènes tournées à Tanger, tournées dans des ruelles de nuit, entre onirisme et cauchemar. Vu en mai 2018 (Arte) (Marianne)