Critique : Il n’y a pas à dire, Sandrine Collette sait y faire pour plonger d’emblée le lecteur dans la peau de son personnage principal et le mettre ainsi en difficulté dans la gestion de ses sentiments. Le récit repose sur deux cents pages dans lesquelles le malaise est immense. La plume parfaite de l’autrice, qui va à l’essentiel, est fidèle à ses derniers romans, notamment Ces orages-là et Et toujours les forêts. Les mots choisis sont crus, vrais et font réagir. Quelle force ! Dans ce livre, on est confronté à la dureté d’un père envers son fils. Cet homme, qui ne désirait pas d’enfant, a des pensées inavouables et monstrueuses. Pour lui, un enfant, ça ne sert à rien, surtout dans les montagnes. Peut-être aurait-il fallu faire comme avec les petits chatons, leur taper la tête contre un mur pour les tuer...
Lui a simplement besoin de se retrouver seul, pour traquer, épier les loups, et Ava lui suffit amplement. Il faut attendre une scène terrible, qu’on ne dévoilera pas ici, pour que Liam réagisse enfin, qu’il se sente progressivement père et commence à éprouver des sentiments pour son gamin. Un long chemin semé d’embûches que Liam et Aru vont devoir parcourir ensemble, à dos de cheval, dans un décor austère. Le lecteur est alors très vite pris au piège entre le petit Aru âgé de cinq ans et demi, que l’on a envie de protéger, et son père bourru à qui on a finalement envie de donner une nouvelle chance. Avec ce roman, l’auteur met le doigt sur la reproduction des gestes et de la violence intrafamiliale. Peut-on y mettre un terme ? Ou agissons-nous inévitablement par mimétisme ? Peut-on pardonner à ceux qui nous ont violentés et renaître ? On était des loups est un titre qui résume parfaitement la façon dont vivent Liam, Ava et Aru dans ces montagnes. Ce récit passionnant, qui se lit d’une traite, est une vraie réussite et ne laissera pas le lecteur indemne !